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Un aperçu du film Les Nageuses par une avocate spécialisée en immigration

  • 30 novembre 2022
  • Carrie Wright

Le Festival international du film de Toronto, connu sous le nom de TIFF, est l’un des plus grands festivals publics de cinéma au monde. Il a la réputation de présenter le meilleur du cinéma au meilleur public — et je ne l’affirme pas seulement parce que je fais partie de ce public ! En 2022, le TIFF a présenté la première mondiale du film Les Nageuses dans le cadre de son gala d’ouverture. Le directeur général du TIFF, Cameron Bailey, a déclaré avoir été ému par cette histoire et a choisi Les Nageuses comme film d’ouverture pour rendre hommage à ceux et celles qui ont tout risqué à la recherche d’une vie meilleure et plus sûre.

Les Nageuses a été réalisé par Sally El Hosaini, et écrit par El Hosaini et Jack Thorne. Le film est basé sur l’histoire vraie de deux sœurs, Yusra et Sara Mardini, qui se sont échappées de Syrie après le début de la guerre dans le but de se rendre en Allemagne, où elles comptaient obtenir le statut de réfugiées pour elles-mêmes et pour leur famille restée en Syrie. Entraînées à la natation par leur père depuis leur plus jeune âge, les sœurs rêvent de participer un jour aux Jeux olympiques. Elles quittent la Syrie dans l’espoir de faire de ce rêve une réalité. Le film retrace le voyage des sœurs vers l’Allemagne, ainsi que leurs expériences à leur arrivée. Elles s’échappent d’abord au Liban, puis se dirigent vers la Turquie où elles traversent la Méditerranée pour rejoindre la Grèce dans des conditions dangereuses. Elles poursuivent ensuite leur route à travers l’Europe jusqu’en Allemagne, où elles sont confrontées à des retards et à des incertitudes dans le traitement de leur demande de statut de réfugiées. À travers tout cela, Yusra et Sara maintiennent leur ténacité, et Yusra parvient à attirer l’attention de l’entraîneur de natation Sven Spannekrebs, qui accepte d’entraîner les sœurs pour les aider à réaliser leurs rêves olympiques.  

En tant qu’avocate spécialisée en immigration, je crois que j’ai vu le film sous un angle très particulier. Même si je ne connaissais pas précisément l’histoire de Yusra et de Sara, j’avais une idée générale de ce à quoi leur voyage ressemblerait, car il y a tant de personnes avec des histoires déchirantes similaires qui sont passées, et continuent de passer, par le système des réfugiés ici et à l’étranger. De plus, bien que je ne sois pas familière avec les procédures d’immigration allemandes, je m’attendais à ce que leur arrivée en Allemagne ne soit pas tout à fait ce que les sœurs espéraient ou prévoyaient. Lorsqu’elles s’entretiennent avec un agent chargé du dossier de leur demande, je savais ce qu’elles allaient apprendre : on leur dit que leur demande sera traitée pendant deux ans et qu’elles ne seront peut-être pas être autorisées à faire venir leur famille en raison des exigences législatives. Partout, les avocats spécialisés en droit de l’immigration ont eu à annoncer des nouvelles aussi difficiles à leurs clients, qui ont désespérément besoin de certitude et de sécurité, mais qui sont coincés dans les limbes de la bureaucratie.

Le film constituait un excellent gala d’ouverture pour une avocate spécialisée en immigration. D’une part, il m’a rendue fière de mon travail — de faire partie d’une communauté mondiale qui cherche à défendre les droits de ceux qui sont dans la situation de Yusra et de Sara et à leur apporter de l’aide. C’est un privilège particulier de pouvoir être aux côtés des gens lorsqu’ils sont à leur plus vulnérables. Il est également encourageant de constater que les efforts des sœurs n’ont finalement pas été vains. D’un autre côté, cela m’a rappelé que notre système de traitement des demandeurs d’asile peut être amélioré afin de garantir l’équilibre entre l’intégrité du programme et les préoccupations en matière de sécurité, d’une part, et la compassion et l’empathie pour ceux et celles qui ont vécu des horreurs dépassant ce que la plupart d’entre nous peuvent imaginer, d’autre part. Bien que j’aie déjà entendu des histoires similaires, j’ai été émue par les images de milliers de gilets de sauvetage jetés sur le rivage grec et par les dizaines de personnes dans le hangar où Yusra et Sara sont hébergées pendant qu’elles attendent, dans la frustration, d’obtenir un statut légitime en Allemagne. 

Ce n’est pas un film facile à regarder, mais c’est une histoire puissante d’espoir et de cœur. En tant qu’avocate spécialisée en immigration, ce film m’a rappelé les réalités auxquelles sont confrontés de nombreux demandeurs d’asile, non seulement pendant leur voyage physique, mais aussi une fois qu’ils ont atteint leur destination. Il incite à la réflexion sur notre système actuel de réfugiés et sur ce qu’est, ou devrait être, mon rôle dans ce système. 

Les Nageuses est sorti sur Netflix à travers le monde le 23 novembre 2022.  

À PROPOS DE L’AUTRICE

photo of author Carrie WrightCarrie est associée chez BARTLAW LLP et avocate à Toronto, en Ontario. Depuis qu’elle a rejoint BARTLAW LLP en août 2011, Carrie exerce exclusivement dans le domaine du droit de l’immigration et de la citoyenneté canadienne. Elle a aidé des entreprises et des particuliers dans le cadre de demandes de permis de travail, d’évaluations de l’impact sur le marché du travail, ainsi que de questions et d’examens de conformité des employeurs. Carrie est expérimentée et compétente en matière de droit canadien de l’immigration concernant les cartes de résident permanent, la citoyenneté, les demandes pour raisons humanitaires et les demandes de statut de réfugié, et a représenté des clients dans le cadre de plusieurs demandes d’autorisation et de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale.

 

Cet article a d’abord été publié sur la page des articles de la section Citoyenneté et immigration de l’ABO.